Défense : stands israéliens interdits au salon du Bourget sur fond de tensions géopolitiques

Derniers préparatifs avant la 55e édition du salon Le Bourget près de Paris, le 15 juin 2025
Derniers préparatifs avant la 55e édition du salon Le Bourget près de Paris, le 15 juin 2025 Thomas SAMSON / AFP
Le gouvernement français a ordonné de condamner l’accès aux stands de cinq industriels israéliens de l’armement exposant des « armes offensives » au salon aéronautique du Bourget lundi 16 juin. Israël dénonce une décision « scandaleuse ».

Les tensions géopolitiques se sont invitées au salon du Bourget dès son ouverture lundi matin, avec la condamnation ordonnée par le gouvernement français de stands d’industriels d’armement israéliens, sur fond de guerre à Gaza et de conflit avec l’Iran.

Ce coup de théâtre a éclipsé la première commande commerciale du salon annoncée par Airbus, 40 appareils à un loueur saoudien, tandis que son rival américain Boeing était contraint à la discrétion dans la foulée de la catastrophe aérienne meurtrière en Inde la semaine dernière.

Stands israéliens interdits

Le président israélien Isaac Herzog a dénoncé une décision « scandaleuse » après que des stands d’industriels d’armement du pays au salon aéronautique du Bourget ont été interdits d’accès sur décision du gouvernement français.

« Nous avons été choqués de constater ce matin que les pavillons israéliens étaient bouclés et verrouillés, empêchant tout accès pendant le salon. Des entreprises israéliennes ont signé des contrats avec les organisateurs, ils ont payé (…) C’est comme créer un ghetto israélien (…) Je trouve cela scandaleux et cela doit être corrigé immédiatement », a déclaré le chef de l’État israélien sur la chaîne française LCI.

Les stands de cinq entreprises israéliennes (dont Aerospace Industries (IAI), Rafael Uvision, Elbit et Aeronautic) ont été ceints de bâches noires lundi matin car ils présentaient des armements « offensifs », comme ceux susceptibles d’être utilisés à Gaza, en violation du cadre agréé en amont avec les autorités israéliennes, a indiqué une source française proche du dossier.

Une exposante israélienne a écrit à la craie sur la bâche de Rafael que ces systèmes d’armement « protègent en ce moment l’État d’Israël », affirmant que « le gouvernement français, au nom de la discrimination, essaie de vous les cacher ».

Même fortement réduite, la présence d’Israël, l’un des leaders des capacités militaires de pointe dans l’aérospatial, constituait déjà une source de tensions, alors que l’État poursuit son offensive sur Gaza après l’attaque meurtrière du Hamas en octobre 2023 et a lancé la semaine dernière des frappes de grande ampleur contre l’Iran, qui a riposté.

Le tribunal judiciaire de Bobigny a rejeté mardi la requête d’associations qui demandaient l’exclusion du salon des entreprises israéliennes au nom du risque de perpétuation de « crimes internationaux ». De leur côté, les élus du département de Seine-Saint-Denis n’étaient pas présents à l’arrivée lundi matin du premier ministre François Bayrou, contrairement à la tradition, également en signe de protestation contre la présence de ces entreprises.

Première commande pour Airbus

Cette polémique a fait passer au second plan la première commande commerciale du salon : le loueur AviLease basé en Arabie saoudite a signé un contrat ferme pour 10 avions-cargo gros porteurs Airbus A350F et 30 appareils de la famille A320neo, monocouloir à succès du géant européen, ont annoncé les entreprises lors d’une conférence de presse.

Alors que le salon international de l’aéronautique et de l’espace, qui se tient tous les deux ans au Bourget au nord de Paris, est habituellement le théâtre d’un affrontement entre Boeing et Airbus à coups de contrats géants, l’avionneur américain a décidé de réduire ses activités après le crash d’un 787 d’Air India qui a fait au moins 279 morts la semaine dernière.

« Nous nous concentrons sur le soutien à nos clients, plutôt que des annonces de commandes lors de ce salon », a déclaré lundiune porte-parole de Boeing, dont le patron Kelly Ortberg avait déjà décidé d’annuler sa venue en France pour « rester avec nos équipes et consacrer notre attention à notre client et à l’enquête ».

Le drame a jeté une ombre supplémentaire sur ce qui est habituellement une grande fête de l’aérien, déjà marquée cette année du sceau des guerres, militaires et commerciales en cours.

Défense en pointe

Dans un contexte international tendu, sur fond de guerre en Ukraine et avec l’intention de l’Europe de renforcer sa souveraineté stratégique, le salon est particulièrement attendu sur le thème de la défense.

Autre dominante : les guerres commerciales lancées début avril par le président américain Donald Trump, sont lourdes de menaces pour une industrie aéronautique aux chaînes d’approvisionnement mondialisées.

La féminisation sera aussi l’un des fils rouges de cette édition du salon, organisé depuis 1909 tous les deux ans, le premier jour d’ouverture au grand public, vendredi, étant consacré aux femmes. Le même jour, le président Emmanuel Macron est attendu avec un discours sur la nouvelle stratégie spatiale française.